Si on peut se réjouir de la mise en place d’une aide sociale exceptionnelle de 100 € supplémentaires pour tous les ménages qui bénéficient du chèque énergie, cela restera insuffisant, d’autant plus que la pandémie a fortement dégradé la situation financière d’un certain nombre de ménages et notamment les plus pauvres. Rappelons que 79 % des consommateurs interrogés se disent préoccupés par leur consommation d’énergie. Pour 71 %, les factures d’énergie représentent une part importante dans leur budget.
Pour rappel, le médiateur national de l’énergie a rappelé qu’il faudrait doubler le montant moyen du chèque énergie pour qu’il atteigne 300 € au lieu de 150 € actuellement. L’observatoire de la précarité énergétique rappelle que les aides nécessaires pour sortir l’ensemble de la précarité énergétique s’élèveraient à 3.1 milliards d’€/an soit 710€/logement/an. Et qu’une augmentation du 10% des prix de l’énergie conduirait à plus de 400 000 ménages supplémentaires en situation de précarité.
Enfin, selon le 10e baromètre du pouvoir d’achat Cofidis, les Français estiment manquer de 467 euros par mois en moyenne pour vivre sans se soucier de leur budget. L’enquête en 2019 de la Drees montrait que les français estiment que l’on vit décemment avec 1760€ net/mois.
Depuis l’ouverture à la concurrence et la libéralisation du secteur de l’énergie, les prix d’électricité ou de gaz sont à la hausse en France mais également partout en Europe.
Le gouvernement espagnol a décidé de baisser de moitié le taux de TVA sur l’électricité de 21% à 10% tant que les prix sur le marché de gros resteront élevés. Cette mesure concerne environ 612 000 ménages. Dernièrement, la coalition de gauche au pouvoir à Madrid a décidé une baisse temporaire de l’impôt spécial sur l’électricité payé par entreprises et particuliers de 5.11% à 0,5%.
Comme nous le revendiquons depuis longtemps, notre ONG milite pour une application d’un % de TVA réduit à 5.5 % sur les factures de gaz et d’électricité pour l’ensemble des consommateurs. Le gouvernement français pourrait prendre appui sur son voisin et agir immédiatement pour réduire les dépenses incompressibles des ménages. Après plus d’un an et demi de pandémie sanitaire entrainant perte d’emploi, chômage partiel subis, cela serait une juste mesure sociale.
Pour nous, il s’agit également de remettre en cause la politique européenne basée sur la libéralisation de l’énergie notamment à travers son paquet énergie climat qui vise à l’établissement d’un marché intérieur de l’énergie permettant la libre circulation de l’énergie, sans barrière technique, ni réglementaire !
La politique européenne qui consiste, pour pallier à l’intermittence des énergies solaire et éolien, à faire la part belle au gaz au détriment du nucléaire va se traduire par une plus forte dépendance au gaz russe avec la mise en service du gazoduc Nord Stream 2, cela va contribuer à l’augmentation des émissions de CO2 en Europe et dans le monde. La politique européenne est en parfaite contradiction avec les dernières recommandations alarmistes du rapport du GIEC.
Le fort développement des énergies intermittentes (au détriment des moyens de production pilotables), avec des prix de rachat de l’électricité prohibitifs, leur priorité d’injection et les investissements sur les réseaux va faire augmenter la facture d’électricité des ménages ! Elle nous fait également courir le risque majeur d’un black-out !
Et cela ne s’arrêtera pas, les prix ne cesseront d’augmenter1 puisque la déclinaison du pacte vert de l’Europe va se traduire par l’élargissement, du marché carbone complètement volatil, au secteur du transport routier et du bâtiment qui conduira de fait les fournisseurs d’énergie, essence, fioul, gaz…à répercuter sur le tarif des consommateurs leur droit à polluer, pénalisant encore plus les plus pauvres. La France qui prendra la présidence de l’Union européenne l’année prochaine doit s’y opposer.
Il est temps d’agir en Europe pour plus de coopérations en développant les services publics de l’énergie susceptibles de faire converger les économies, les finances, les budgets vers un nouveau mode de développement fondé sur les options d’efficacité économique, social et écologique.
1 D’après des modélisations de l’université de Cambridge, l’augmentation des factures énergétiques pourrait être de 400 à 800€ annuels.